Je ne le redirai jamais assez mais je suis un amoureux du Canada et (surtout) de sa province francophone, le Québec. C’est clair, je m’y sens comme un poisson dans l’eau et j’adore découvrir sa culture et son histoire hors du commun.
Une histoire hors du commun justement, il en est question, dans le film de Lyne Charbelois, une histoire d’amour entre un homme d’Église et une jeune botaniste, mais pas dans le sens qu’on croit, du moins c’est plus subtil que cela. Nous sommes en 1930 à Montréal. Marcelle Gavreau, étudiante de 23 ans au Jardin botanique, fait la connaissance du fondateur des lieux, le Frère Marie-Victorin. Très vite, une profonde amitié lie les deux personnes et la femme de 23 ans deviendra la collaboratrice du religieux. Animé par un respect mutuel, l’affection qu’ils portent l’un à l’autre mais également une fascination de la nature et de la science, leur relation mutera à travers des échanges épistolaires dans lesquels ils parleront de tout aussi de la religion que de leurs réflexions les plus profondes notamment en ce qui concerne l’étude du désir et de la sexualité.
Marcelle Gavreau et le frère Marie-Victorin ont quelque chose de fusionnel, voire de très charnel entre eux, bien que ces derniers ne soient jamais allés au-delà de la simple relation intellectuelle. D’ailleurs, cette règle tacite, ils la respectent avec rigueur, estimant que braver cet interdit serait une menace à leur équilibre et leur bonheur mutuel. Ils sont très religieux mais veulent comprendre comment la nature fonctionne mais aussi le corps humain avec ses mystères et ses désirs. Une façon de mieux appréhender la société dans laquelle ils vivent et l’encourager à l’émancipation.
En effet, le Québec des années 1930 reste une société corsetée où la religion occupe une place forte et où les hommes d’Église ont autant de poids que les hommes d’État, sinon plus. Dans ce contexte, certaines questions demeurent taboues, la question de la sexualité en fait partie. Aussi, lorsqu’elle est étudiée par un prêtre et son assistante et évoquée, épistolairement, sans voile et sans filtre, c’est un peu une révolution pour l’époque. Le frère Marie-Victorin et la jeune Marcelle confortent leur point de vue, d’égal à égal et se donnent à l’autre, métaphysiquement et non physiquement, ce qui change la donne.
Une relation qui ne sera pas du goût de certains qui estiment, même, qu’elle nuit au frère Marie-Victorin, ce dernier étant même invité à prendre ses distances avec sa protégée. Il en faut cependant bien plus à l’homme d’Église pour obéir et rentrer dans le rang, bien au contraire ! Marie-Victorin – de son vrai nom Conrard Kerouac – est un frondeur respectueux de sa foi et qui fait du modernisme, sa raison d’être. C’est dans cette optique qu’il a fondé le Jardin botanique, c’est dans cette optique qu’il entretien cette relation si spéciale avec Marcelle, c’est dans cette optique qu’il sera précurseur de la Révolution tranquille lancée par le gouvernement de Jean Lesage dans les années 1930.
Un amour véritable, pur et métaphysique qui fait écho à la relation des deux acteurs qui incarnent respectivement le frère Marie-Victorin et Marcelle Gavreau, comme pour nous plonger dans notre époque et nous poser une question simple mais essentielle : peut-on vraiment aimer sans amour charnel ? ou plutôt a-t-on vraiment besoin du charnel pour réellement aimer ?
Film juste, Dis-moi pourquoi ces choses sont si belles constitue une agréable surprise et une bonne alternative pour celles et ceux qui veulent découvrir quelque chose de différent… et de beau.
Dis-moi pourquoi ces choses sont si belles
Un film de : Lyne Charlebois
Avec : Alexandre Goyette, Mylène MacKay, Rachel Graton, Francis Ducharme, Vincent Graton, Sylvie Moreau…
Pays : Canada
Genre : Drame
Durée : 1h39
Sortie : le 13 août
Note : 15/20




