Cannes citoyen

Comme chaque année, c’est avec une certaine attente et un plaisir certain que je regarde ce qui se passe du côté de Cannes et de son traditionnel Festival international du cinéma. 

Une édition 2025 menée par Laurent Laffite qui, pour la seconde fois, officie en tant que maitre de cérémonies. Une prestation sobre, soignée mais surtout très politique, en témoigne son discours et ses références claires à l’actualité internationale. 

Plus largement, c’est la cérémonie elle-même qui a été très politique, cette année. Entre l’allusion aux attaques du Hamas du 7 octobre 2023, l’hommage appuyé de Juliette Binoche, présidente du jury, à Gaza et la photoreporter Fatima Hassouna, récemment victime d’une opération de l’armée israélienne et un discours engagé à l’encontre de Donald Trump, Cannes a rappelé que si ce Festival est avant tout un festival qui consacre le cinéma et ceux qui le font, c’est également la tribune de l’engagement, voire des revendications. Un « Cannes citoyen » comme l’a si justement rappelé Laurent Laffite comme ce fut déjà le cas en 2023 lorsque Volodymyr Zelenski, président de la République d’Ukraine et acteur de profession, avait fait une intervention remarquée. 

Robert de Niro recevant des mains de Leonardo Di Caprio, une Palme d’Or d’honneur lors de la cérémonie d’ouverture du 78ème Festival de Cannes

Comme je le disais précédemment, il fut question de Donald Trump durant cette cérémonie et à ce petit jeu, Robert de Niro n’y est pas allé à quatre chemins. L’acteur américain, qui s’est vu remettre des mains de Leonardo Di Caprio une Palme d’Or d’honneur, a fustigé la politique du président des Etats-Unis notamment dans le domaine des arts, des sciences et de la culture, le locataire de la Maison Blanche envisageant, ni plus ni moins, d’instaurer une taxe de 100% pour tout film produit en dehors des Etats-Unis et qui y voudrait être commercialisé. Une attaque inédite et surtout inique contre le cinéma que Bob de Niro s’est empressé de dénoncer, rappelant au passage que le septième art reste un formidable levier pour rapprocher les gens et surmonter les soubresauts de notre monde, en témoigne la création, en 2002, du Festival de Tribeca à New York, quelques mois seulement après les terribles attaques du 11 septembre. 

Juliette Binoche, présidente du jury du 78ème Festival de Cannes, montant les marches

Certains diront que le Festival de Cannes est politique et que c’est tant mieux ainsi. D’autres diront au contraire que la politique n’a rien à faire et que nous sommes là pour célébrer le cinéma comme il se doit. C’est oublier même l’essence de cet événement créé une première fois en 1939 juste avant la Seconde Guerre mondiale, en opposition avec la Mostra de Venise, alors sous domination fasciste. C’est également oublier que les actrices et les acteurs sont aussi des femmes et des hommes avec une sensibilité, des opinions et des combats qu’ils défendent mordicus. A ce titre, Cannes a été, est et sera toujours une tribune (idéale) pour faire valoir ce que l’on croit ou militer. D’ailleurs, certains ne s’y sont pas trompés l’année dernière, rappelant le sort des otages israéliens ou d’autres, à l’instar de l’Australienne Cate Blanchett, le martyr des Gazaouis, sans oublier le comportement, opportuniste pour le coup, du collectif Némésis.

Tout cela pour dire que Cannes 2025 ne déroge pas à la règle, mieux elle le revendique. Le Festival revendique qu’il est un événement citoyen, qui n’hésite pas à donner son opinion sur l’état du monde et même à agir de façon militante, ce qui fait qu’il est particulièrement attendu et respecté. Encore une fois, on peut apprécier ou regretter ce fait mais il existe bel et bien, ce que la cérémonie d’ouverture a rappelé sans équivoque. 

Ce qui ne veut pas dire que le strasse et les paillettes ne seront pas au rendez-vous, bien au contraire ! Durant cette nouvelle quinzaine nous aurons le temps de rêver mais aussi de participer de plus en plus à un Festival qui se veut plus inclusif et plus ouvert, en témoigne la cérémonie d’ouverture que j’ai pu suivre depuis l’UGC Ciné Cité La Défense mais aussi la projection de Partir un jour, le film qui a inauguré la 78ème édition et dont je ne manquerai pas de vous livrer mes impressions très prochainement.  

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