Pauvres créatures : hors de contrôle

Yorgos Lanthimos est un cinéaste à l’univers assez particulier, déroutant, et parfois « oppressant ». C’est en tout cas le sentiment que je me suis fait après avoir vu The Lobster, sorti il y a un peu plus de neuf ans, le seul film que j’ai vu du réalisateur grec de mémoire. Un film assez loufoque où des célibataires étaient réunis dans un hôtel et avaient quarante-cinq jours pour trouver leur moitié sous peine d’être transformés en un animal de leur choix ! 

Neuf ans après donc et quelques autres long-métrages plus tard, Yorgos Lanthimos n’a rien perdu de son délire cinématographique, bien au contraire ! Nous sommes à Londres. Bella est une jeune femme qui a été ramenée à la vie par le Docteur Godwin Baxter. Personne en apparence adulte, elle a l’esprit et la pensée d’un enfant mais qui apprend vite les choses de la vie, au fur et à mesure que son cerveau se développe. Avide de découvertes et enfermée dans la maison de celui qu’elle surnomme God, elle décide s’en fuir avec Duncan Wedderburn, un avocat cupide et débauché. Bella part à la rencontre d’un monde dont elle ignore tout, ce qui ne sera pas sans conséquences sur sa façon d’appréhender les choses, d’autant que progressivement des éléments de sa vie d’avant refont progressivement surface. 

Pauvres créatures s’est distingué lors de l’édition 2024 des Golden Globes en s’adjugeant le prix de la meilleure comédie et (surtout) celui de la meilleure actrice pour Emma Stone, une récompense hautement méritée pour l’actrice de bientôt 36 ans. Il faut dire qu’elle est particulièrement impressionnante dans le rôle de Bella, cette femme avec l’esprit d’un enfant (ou cet enfant dans le corps d’une femme, si vous voulez) qui se moque allègrement des conventions et autres convenances, bien au contraire ! Au fur et à mesure que son cerveau se développe (et qu’elle grandit donc), Bella gagne en assurance mais aussi en pouvoir notamment envers les hommes. 

Des hommes qui tentent de la contrôler sur tous les plans, émotionnel, comportemental mais aussi sexuel. Il y a notamment le Docteur Baxter, son « père » mais aussi et surtout Duncan qui en faire une sorte de potiche bien élevée et soumise, du moment qu’elle satisfait ses besoins. Une situation qu’on pourrait considérer comme défavorable pour Bella mais qui en réalité s’avère bien plus qu’utile.

Avide de découvertes sur le monde, Bella construit sa personnalité, s’affirmant de plus en plus dans ses choix et ses désirs, ce qui rend fou les hommes qui la côtoient. Ils veulent la dominer ? Elle échappe à leur contrôle et plus elle en sait sur le monde, plus elle est libre de son corps et de ses décisions, rhabillant les hommes pour l’hiver. Bella ne fait pas dans la dentelle, elle est incisive mais c’est ainsi qu’elle tire son épingle du jeu pour mieux s’imposer. 

Avec 2 heures 22 au compteur, Pauvres créatures derrière son côté loufoque et comédie noire, se veut en réalité très actuel dans sa façon d’aborder la femme, une éternelle enfant pour certains hommes rétrogrades, une enfant qui finit par s’émanciper et se rebeller.  

Pauvres créatures (Poor things)

Un film de : Yórgos Lánthimos

Avec : Emma Stone, Mark Ruffalo, Willem Dafoe, Ramy Youssef, Jerrod Carmichael, Christopher Abbott, Margaret Qualley, Suzy Bemba, Hanna Schygulla, Damien Bonnard… 

Pays : Grèce

Genre : Science-Fiction, Comédie, Romance, Drame, Fantastique

Durée : 2h22

Sortie : le 17 janvier

Note : 16/20

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